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17 juillet 2008

Canada - Sommet de la Francophonie: Combien de dictateurs à la table ?

Francophonie161008275Carla Bruni viendra-t-elle au Québec avec son mari le président français? Une question qui a préoccupé les médias jusqu'à ce que la décision de l'Élysée vienne briser les fantasmes des paparazzis : non, elle ne sera pas dans le portrait. Le 12e Sommet de la Francophonie, qui se tiendra dans la ville de Québec du 17 au 19 octobre, sera quand même une pépinière d'histoires croustillantes pour qui désire se pencher sur le parcours de certains chefs d'État et délégations qui représentent des pays parmi les plus répressifs et corrompus de la planète.

Malgré la venue de plusieurs dictateurs, la Sûreté du Québec a indiqué que, selon les informations dont elle dispose, il ne devrait pas y avoir de manifestation d'envergure et encore moins de débordement. À ce titre, les «précautions» prisent lors du Sommet des Amériques de 2001 n'auront pas lieu. Périmètre de sécurité, oui. Clôture imperméable, non.

Peut-être si le président américain, George W. Bush – que certains tiennent responsable de tous les maux de la Terre – parlait la langue de Molière, la police aurait été plus sur les talons. Malheureusement pour la gauche québécoise, M. Bush ne sera pas de la partie. Mais la venue du président français, Nicolas Sarkozy, pourrait échauder certains esprits. Un billet publié sur le site du Centre des médias alternatifs du Québec (CMAQ) lance les hostilités : «... le kingpin néo-fasciste français Nicolas Sarkozy viendra salir le sol montréalais de ses bottes pour la première fois... or il sera à notre portée!»

Dans le contexte de la Francophonie, où la France trône au sommet en tant qu'ancienne puissance coloniale (pas entièrement repentie diront certains), le débat sur l'évolution et le développement des membres de l'organisation peut constituer une source de discorde. Un siècle d'exploitation et de répression peut-il expliquer les maux d'un pays jusqu'à aujourd'hui? Qu'est-ce qui explique que certains s'en tirent plutôt bien alors que d'autres ont un dossier pitoyable? Ficelles tirées par la métropole et le «grand ordre mondial» ou élites locales corrompues? Ce n'est pas tout noir ou tout blanc.

L'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) devrait cependant, officiellement, œuvrer à faire progresser tous les membres de sa communauté. Ses missions sont : «Promouvoir la langue française et la diversité culturelle et linguistique; promouvoir la paix, la démocratie et les droits de l’Homme; appuyer l’éducation, la formation, l’enseignement supérieur et la recherche; développer la coopération au service du développement durable et de la solidarité.»

Montrant qu'elle n'allait pas laisser ses principes se faire piétiner, l'OIF a suspendu la Mauritanie – victime d'un coup d'État au mois d'août – et elle ne devrait pas être représentée à Québec au 12e Sommet.

Les vieux dictateurs seraient-ils plus accommodants, moins gênants et... plus démocratiques? Car un bref tour de piste des visiteurs attendus dans la ville du 400e révèle que de nombreux chefs d'État sont d'abord arrivés au pouvoir par un putsch. Si certains ont été «élus» depuis, avec des scores à la 95 %, leur maintien en place relève souvent de la force brute, du népotisme et de la cleptocratie.

Le doyen

Omar_Bongo021008250Pour débuter l'examen des mains de fer, il faut inévitablement passer par le doyen des chefs africains, l'illustre Omar Bongo. Ce dernier, au pouvoir depuis 1967 et ne cachant pas son désir de gouverner à vie, n'a que faire des éloges posthumes : il a rebaptisé sa ville de naissance Bongoville et l'université de la capitale porte son nom.

Toutes ces années au pouvoir lui auront valu plus que ces auto-hommages : on dit que Bongo est l'un des chefs d'État les plus fortunés de la planète. II est toujours bien en vue dans la «Françafrique» et malgré la «rupture» prêchée par Sarkozy, le président français s'est assuré de maintenir de solides liens avec l'ancienne colonie. «Omar Bongo est le doyen des chefs d'État et, en Afrique, le doyen, cela compte», a déclaré Sarkozy lors d'une visite officielle au Gabon en juillet 2007, selon Le Monde. Si Omar Bongo vient à Québec, les deux hommes pourront certes s'échanger une poignée de main chaleureuse.

Le contesté

Biya130907200Selon différents sites camerounais, le président du Cameroun, Paul Biya, pourrait faire l'objet de contestations à Québec. On rapporte que son personnel serait actif au Canada pour sonder la communauté camerounaise et récolter des appuis afin d'offrir à M. Biya un «accueil chaleureux». Mais cet homme politique n'est pas porté dans tous les cœurs. Au pouvoir depuis 1982, il a provoqué de violentes émeutes plus tôt cette année lorsqu'il a décidé de briguer un autre mandat en 2011. On peut donc lire sur Internet que «plusieurs Camerounais du Canada comptent profiter du séjour de Paul Biya au Canada pour lui réclamer des réponses sur les questions liées à la décrépitude du Cameroun».

Le pire

Obiang061207200La Guinée équatoriale de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo figure parmi les pays les plus mal en point du monde. Nguema Mbasogo est arrivé au pouvoir en 1979 en assassinant son propre oncle. Depuis, il a été élu en 2002, mais avec un score de 97 %. Malgré des réserves de pétrole qui en font le troisième pays producteur en Afrique, les habitants de la Guinée équatoriale sont des plus pauvres. La raison est fort simple : le pays se classe 168e sur 180 sur l'échelle de corruption de l'organisme Transparency International.

Les héritiers

mohamemed_vi08La Francophonie, malgré ses principes de démocratie, n'est pas exempte de princes héritiers. Étrangement, c'est probablement un vrai prince, descendant d'un vrai roi dans un régime monarchiste, qui a amené son pays à faire le plus de progrès en devenant le nouveau souverain, le roi Mohammed VI du Maroc.

Quant aux faux princes, il faut désigner Joseph Kabila en République démocratique du Congo, ayant succédé à son père Laurent-Désiré Kabila, assassiné en 2001. Bien qu'élu en 2006 dans des élections ayant marqué un pas vers l'avant, Kabila fils n'a pu instaurer un climat de bonne entente et il est accusé de ne tolérer aucune opposition. Le pays est déchiré par des conflits armés internes, largement motivés par ses immenses ressources naturelles.

L'autre prince est Faure Gnassingbe du Togo. Placé au pouvoir par l'armée en 2005 après la mort de son père, Eyadema, qui avait dirigé le pays durant 38 ans, il a été «élu» la même année dans un processus marqué de violences. Les crimes commis par le pouvoir dans cet épisode demeurent impunis.

Quant à Hosni Mubarak, à la tête de l'Égypte depuis 1981, on soupçonne qu'il lèguera le pouvoir à son fils Gamal.

Non les moindres

Plusieurs autres dirigeants de pays membres de la Francophonie ne donnent pas leur place en matière de mauvaise gouvernance, de répression des droits fondamentaux et de corruption.

Denis_Sassou_Nguesso290408250Le Congo Brazzaville de Denis Sassou-Nguesso se classe 141e sur 150 dans l'évaluation de la démocratie de WorldAudit.org .

Paul Kagame, aux commandes du Rwanda, est loin de faire l'unanimité dans ce pays traumatisé par la rivalité ethnique. Lors de sa visite à Montréal en 2006, des membres de la communauté rwandaise l'avaient accueilli avec une brique et un fanal.

Idriss Déby du Tchad est arrivé au pouvoir par un coup d'État en 1990. À deux reprises, dernièrement, son régime, menacé par des rebelles, a été protégé par une intervention de l'armée française.

Ben_Ali_Compaore_Conte08Ben Ali en Tunisie, Blaise Compaore au Burkina Faso et Lansana Conte en Guinée ne donnent pas leur place non plus, littéralement. Ces hommes sont au pouvoir depuis respectivement 1987, 1987 et 1984. Ben Ali est, selon Reporters sans frontière, un «prédateur» de la liberté de la presse.

La filière indochinoise

Pour corriger cette image d'une Afrique damnée par la dictature, il est utile de souligner la présence dans la Francophonie de régimes asiatiques totalitaires. En premier lieu, la dictature communiste du Laos, un des pays les plus répressifs et corrompus de la planète. En deuxième lieu, la dictature communiste du Vietnam. D'abord, une âpre lutte des nationalistes et communistes vietnamiens pour expulser la France. Ensuite, un combat sans merci pour mettre dehors les États-Unis... Beaucoup de sang versé des Vietnamiens pour gagner une liberté qui n'est jamais venue.

Selon une agence gouvernementale vietnamienne, Québec devrait recevoir en fin de semaine la vice-présidente du Vietnam, Nguyên Thi Doan. Celle-ci aurait «émis le souhait que les deux pays ne laissent pas leurs différences, en termes de démocratie et de droits de l’Homme, perturber les relations bilatérales». Bien entendu, rien ne devrait faire obstacle au commerce...

En troisième lieu, le Cambodge. Moins pire que ses voisins, mais néanmoins autoritaire et corrompu.

Pas que du négatif

Malgré ce sombre portrait, il y a quand même des États membres de l'OIF qui ont mérité le respect. En Afrique, on note Sao Tomé et Principe, l’île Maurice, le Bénin, le Cap-Vert, le Mali et le Sénégal. En Europe, deux anciens satellites soviétiques, la Bulgarie et la Roumanie, ont réussi leur transition vers la démocratie.

Voyons si le Sommet de la Francophonie à Québec pourra inciter les pires à tendre vers le bon, plutôt que de produire une simple opportunité de copinage pour dirigeants en manque d'amour populaire.

© La Grande Époque : Antoine Latour via Camer.be

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