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23 janvier 2010

Burkina Faso, Blaise Compaoré au Palais des Sports: Comme les dieux du stade, il faut savoir partir

Blaise_Compaore300709275En marge du Sommet franco-africain de Nice, en juin dernier, le Président du Faso, Blaise Compaoré, a été l’invité de la Télévision France 24. Et à la question du journaliste à savoir s’il est candidat à la présidentielle de 2010, l’enfant de Ziniaré a répondu sans ambages : « oui ». Sous d’autres cieux, cette déclaration aurait fait un tollé au sein du parti au pouvoir, car il est inhabituel, voire inadmissible, d’annoncer sa candidature à l’extérieur alors que la formation politique dont il porte les couleurs ne l’a pas encore désigné officiellement. Cette annonce traduit, sans aucun doute, la réalité au Faso et surtout au sein du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) où il n’y a qu’un seul grand leader, un seul grand chef incontesté et incontestable, à tel point que certains caciques tiennent à montrer qu’ils ne lorgnent ni de près ni de loin son fauteuil, en tenant des propos qui confinent à l’hérésie. Qui est fou pour se mettre sur le chemin de l’homme du 15 octobre 1987.

C’est donc tout naturellement que les 6 et 7 août derniers lors de son congrès extraordinaire, mais qui n’était en réalité que tout ce qu’il y a d’ordinaire, que le CDP a officiellement choisi Blaise Compaoré comme son cheval pour la course à la présidentielle de novembre prochain. Deux semaines plus tard, le candidat naturel a été investi au Palais des Sports de Ouaga 2000.

Inutile de vous dire que tout ce que le pays a comme cadres du parti au pouvoir et des chapelles politiques de la majorité présidentielle, les directeurs et chefs de service, les opérateurs économiques, les chefs coutumiers étaient présents et se faisaient remarquer en reprenant de fort belle manière les slogans et les hymnes que le comité d’organisation avait savamment préparés.

Avec un tel soutien et une telle mobilisation, le scrutin présidentiel du 21 novembre prochain ne sera qu’une simple formalité. Pour tout un chacun, il est plié depuis. La seule inconnue de cette élection, c’est le taux de participation et le score du président, qui aimerait remporter largement la partie pour montrer aux yeux du monde qu’il est aimé de son peuple.

C’est cette volonté de gagner « à hauteur d’homme » qui a poussé les militants de la FEDAP /BC à mener une campagne et un plaidoyer pour que l’acte de naissance soit accepté comme un document de vote. Un projet vite rangé dans les profondeurs des tiroirs, car son application reviendrait à modifier des textes qui avaient été acceptés par consensus dans le Code électoral, ce qui pourrait s’apparenter à un recul démocratique.

Dans cette même logique du respect de la loi et de l’approfondissement de la démocratie, cette investiture de Blaise Compaoré est en principe la dernière, constitutionnellement parlant. Car, aux termes de l’article 37 de la Constitution, le président du Faso, qui a fait deux mandats successifs de cinq ans, doit faire prévaloir son droit à la retraite présidentielle, après 28 ans de bons et loyaux services.

Mais il se trouve que ses ouailles ne l’entendent pas de cette oreille, eux qui, au nom des réformes politiques, veulent déverrouiller la limitation du mandat présidentiel allant jusqu’à dire que « l’article 37 est antidémocratique », dixit Roch Marc Christian Kaboré, président de l’Assemblée nationale et du CDP.

Les velléités de tripatouillage constitutionnel ne font plus l’ombre d’aucun doute dans notre pays pour permettre au président Compaoré de rester au pouvoir ad vitam æternam. Va-t-il céder aux chants incessants et insistants de ses partisans et autres courtisans, ou va-t-il écouter la voix de la raison pour « quitter les choses avant qu’elles ne vous quittent », comme l’a dit avec un brin de réalisme et de sagesse, le général De Gaulle ?

Fin stratège militaire, doublé de politique averti, Blaise Compaoré serait, sans doute, dans un profond questionnement intérieur. Autant dire qu’il est le dilemme entre accéder aux désiderata de ses partisans et écouter la voix de la sagesse enseignée par le généralissime De Gaulle. Cela dit, nous n’allons pas passer sous silence l’endroit choisi pour cette 4e investiture : un stade. Tout un symbole.

En effet, comme toute activité et après de bons et loyaux services, il faut savoir aller se reposer. Cela est d’autant plus perceptible dans le sport où des acteurs de haut-niveau, après quelques médailles glanées çà et là, prennent une retraite bien méritée et se reconvertissent dans la vie.

Des footballeurs comme Michel Platini et Zinedine Zidane, pour ne citer que ceux-là, ont su tirer leur révérence à temps pour être aujourd’hui des références et des modèles. Des joueurs tels Patrick Viera, pour rester toujours dans le contexte français, qui n’ont pas voulu arrêter leur carrière internationale au bon moment semblent avoir aujourd’hui un petit pincement au cœur.

Le président américain, Barack Obama, a résumé et clos le débat en disant que l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes. Et le plus grand service que le pouvoir de la 4e République puisse rendre au Burkina, c’est de mettre en place des institutions fortes qui vont défier le temps.

A travers le monde, les longs règnes de quelques hommes d’Etat n’ont pas toujours apporter le bonheur que le peuple escomptait. Un long règne ébranle l’introspection et favorise la malgouvernance.

Certes, Blaise Compaoré est arrivé au pouvoir dans des conditions que l’on sait, mais il faut reconnaître qu’il a acquis aujourd’hui une stature internationale du fait de ses médiations et il pourrait rester célèbre à travers le monde pour avoir réconcilié des frères d’un même pays qui s’étripaient tels des goudas, ramenant la paix et la concorde par-ci, par-là.

Déjà avec ses médiations réussies à travers la sous-région, des voix s’élèvent pour réclamer qu’on lui décerne le prix Nobel de la paix. Mais à supposer qu’il reste encore aux affaires, parce qu’il est un “homme exceptionnel”, le Burkina Faso est bien obligé de se passer de lui un jour, même si c’est dans cinquante ans, puisqu’il n’est pas biologiquement éternel. On espère donc que ce mandat sera le dernier et qu’il ne sera pas tenté de se maintenir pour achever ses cinq grands chantiers qu’il a déclinés au Palais des Sports.

La Rédaction, L'Observateur

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