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19 février 2014

Maroc-Cameroun: Hermann Kenfack "reconnaître qu'en février 2008 il y a eu des Martyrs dans plusieurs villes du Cameroun"

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La sixième édition de la semaine des martyrs du Cameroun bat son plein depuis bientôt une semaine aussi bien à Bruxelles siège des institutions européennes qu'à Rabat au Maroc. A cette occasion, le Mouvement de février 2008 au Cameroun avec la collaboration de plusieurs associations développent comme par le passé, des activités où les Camerounais et amis du Cameroun se rencontrent pour commémorer les martyrs du Cameroun. Un combat que soutien Hermann Kenfack, Coordonnateur de l’aumônerie des étudiants subsahariens au Maroc. Graphiste-designer, artiste, poète et activiste, il s'est confié à votre rédaction

Coordonnateur de l’aumônerie des étudiants subsahariens au Maroc, le Mouvement de février 2008 au Cameroun vous a confié la tâche d'organiser une semaine dénommée la « Semaine des martyrs » à Rabat au Maroc. De quoi est-il question exactement?

Je crois qu'il faudrait de prime abord que je fasse une précision importante : j'interviens actuellement, non pas comme responsable de l'accompagnement et de l'encadrement des étudiants subsahariens au Maroc, mais plutôt comme Secrétaire Général du « Mouvement de Février 2008 » au Cameroun. Vous comprenez donc que la dimension internationale de notre organisation appelait depuis sa genèse une internationalisation de ses actions et c'est ce qui se passe effectivement cette année. La « Semaine des Martyrs » est un moment fort durant lequel le mouvement se propose de s'arrêter sur les événements de février 2008 au Cameroun. S'arrêter pour rendre hommage aux victimes. S'arrêter pour assister les familles qui continuent de pleurer leurs enfants. S'arrêter pour travailler à la libération des compatriotes arbitrairement incarcérés depuis février 2008. S'arrêter surtout pour construire de nouvelles perspectives vers lesquelles des actions politiques, culturelles, sociales et économiques ; initiées, accompagnées et réaliser de manière pacifique et démocratique, peuvent s'appuyer sur « février 2008 » et permettre au Cameroun de se développer.

Quels sont les points essentiels de cette semaine des martyrs ?

Cette année, il y a cinq points fondateurs et essentiels qui encadrent toute l'action de la « semaine des martyrs » :
- Il y a en premièrement LA FIGURE de la semaine des martyrs. Cette année c'est le compatriote Paul Eric Kinguè que nous présentons à l'ensemble du peuple camerounais et de la communauté internationale. La figure de la semaine des martyrs c'est à chaque fois un(e) Camerounais(e) qui souffre injustement et qui mène un combat salutaire pour l'ensemble du peuple camerounais et que nous choisissons librement de porter et de soutenir. Un soutien qui ne commence pas seulement lors de la semaine des martyrs et qui ne s'y termine pas non plus.
- Il y a ensuite LE FIL DE FEVRIER 2008. Ce point nous permet de démonter de manière concrète et factuelle une des terribles conséquences de la misère du peuple camerounais et dont les révoltes populaires de février 2008 n'étaient que le sommet de la partie visible de l'iceberg. Nos enquêtes et ceux d'autres organismes nous montrent clairement que la misère, le chômage et la vie chère ont des conséquences terribles. Cette année, nous allons faire un focus mondial sur les jeunes camerounais qui partent clandestinement par millier de leur pays pour venir mourir au Maroc en tentant de trouver une vie meilleure qu'ils croient se trouver en Europe.
- Il y a enfin LA DIALECTIQUE ACTIVE. Ce point se traduit chaque année par une grande conférence internationale à laquelle nous convions plusieurs participants dans le monde. Ils sont des universitaires, des opérateurs économiques, des artistes, des cinéastes, des hommes et femmes politiques du Cameroun comme de l'Europe, des étudiants, des victimes de février 2008. Et autour d'un terme, nous essayons d’identifier des problèmes et d'en chercher les solutions concrètes.

Êtes vous du même avis avec ceux qui pensent que six ans après les émeutes au Cameroun, rien n’a changé ?

En effet, rien n'a changé sur le plan de ce qui avait poussé les populations dans la rue en février 2008 : la vie est toujours chère ; les populations n'arrivent pas à satisfaire leurs besoins les plus élémentaires (eau potable, électricité, santé) ; La corruption continue à sévir (le discours du chef de l’État camerounais au soir du 31 décembre le confirme), le chômage... Bref, à mon sens, en ce février 2014, les tractations et les déclarations mensongères du ministre de l'eau sur les quantités et les dates de l'arrivée de l'eau peuvent être mises en parallèle avec les déclarations d'augmentation du prix du carburant en février 2008. Il suffirait que les ménagères décident de manifester pour réclamer de l'eau, leurs enfants vont les suivre et toute la rue va encore se lever comme en 2008. Donc rien n'a changé, au contraire. Mais pourquoi février 2008 ne peut pas se répéter ? Pour la simple et unique raison que les Camerounais se souviennent très bien de la violence avec laquelle les corps d'élite de la police et de l'armée avaient molesté les manifestants. Et c'est pour cela qu'une bonne partie a décidé de fuir. Ils fuient en prenant les chemins de l’immigration clandestine.

Quel sera le contenu de votre intervention lors de la Conférence-Témoignage de Bruxelles du samedi 08 mars prochain?

Mon intervention va justement porter sur le cas de nos jeunes frères et de nos enfants qui meurent chaque jour en tentant de rallier l'Europe en passant à pieds par le Maroc. Depuis cinq ans que je suis au Maroc, j'ai eu à diriger la communauté camerounaise et maintenant je suis responsable de l'encadrement et l'accompagnement des étudiants subsahariens au Maroc. Et cette position m'a permis de rencontrer et de discuter avec plusieurs subsahariens migrants, et à l'instant où je vous écris beaucoup sont morts noyés ou fusillés ou déshydratés dans le désert. Tout cela dans le silence total des ambassades et des états subsahariens. Mon intervention consistera à démontrer comment la misère, la vie chère et les guerres dans les pays subsahariens depuis 2008 ont fait tripler et quadrupler le flux migratoire de l'Afrique vers l'Europe en passant par le Maroc.

Et à Rabat ?

Comme je viens de l'expliquer, pour notre Mouvement, les jeunes migrants clandestins sont à notre sens des martyrs qui portent la douleur de tout un peuple en souffrance. Ils portent cette douleur par leurs cris de conquête au moment où ils traversent le désert ou qu'ils se jettent par centaines sur les grilles de CEUTA et Melilla. Ils portent cette douleur surtout par leurs cris de détresse au moment où ils rendent l'âme sous les balles des gardes côtes ou dans d'atroces souffrances (noyade, déshydratation sous le soleil du désert). C'est pourquoi l'action au Maroc se focalisera sur les Migrants. Je présenterai un livre que j'ai écris sur l’immigration clandestine au cours d'une soirée hommage et nous avons initié un projet baptisé « TÉLÉGRAMME 2000 » qui a pour but de récolter 2000 signatures de ressortissants subsahariens au Maroc (étudiants et travailleurs) pour rendre hommage aux 2000 migrants subsahariens qui sont morts anonymement en 2013 au Maroc. Ces signatures seront la charge populaire pour interpeller les états subsahariens sur ce fléau.

Nous avons appris que vous allez saisir les autorités locales et plus précisément celles de Douala afin que le rond «Point Dakar» où avait commencé la toute première manifestation avant les des émeutes de février 2008 soit baptisé «Rond Point des martyrs». Où en êtes vous avec les démarches?

En effet, telle est notre ambition et elle est faite pour des desseins essentiellement citoyens et sociologiques. Nous avons produit le document qui explique les fondements de ce projet et qui démontre l'intérêt social et sociologique de cette dénomination. Une telle action permettra au Cameroun de reconnaître qu'en février 2008 il y a eu des Martyrs dans plusieurs villes et que le nombril de ce mouvement est parti de ce lieu qui selon nous doit s'appeler « ROND POINT DES MARTYRS ». Avec cette dénomination, les familles des victimes pourront faire leurs deuils avec le cœur moins lourd. C'est donc une partie de la solution de février 2008 que nous proposons aux autorités ; car notre seul objectif est le bien être des populations à l'aune des événements de février 2008 au Cameroun.

Êtes-vous certain que ce projet aboutira ?

Dans le recueil des lois sur la décentralisation au Cameroun, s'agissant de la planification, de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme et de l’habitat, l’adressage et la dénomination des rues, places et édifices publics incombent à la commune. Le rond-point en question est situé dans l'arrondissement de Douala 3ème où le maire c'est Monsieur Job Théophile KOUOPNANG ; un citoyen patriote et partisan du bien être social et de la paix sociologique. Nous faisons donc cette proposition en connaissant la procédure et en faisant confiance à la clairvoyance du chef de l'exécutif communal.

Revenons sur le contenu de votre programme, un hommage sera également rendu à nos leaders indépendantistes... Avec la diffusion du film réalisé par Jean Marie TENO sur Ernest OUANDIÉ...

Effectivement. Vous savez, Alexis de Tocqueville disait que « l'Histoire est une galerie de tableaux où il y a peu d'originaux et beaucoup de copies » ; c'est dire que les martyrs de février 2014 sur les rives espagnoles ne sont pas moins martyrs que ceux de février 2008 dans les rues du Cameroun, qui eux-mêmes ne sont pas moins martyrs que les indépendantistes des années 1960-70. En fait, pour nous, « Février 2008 » constitue une lunette herméneutique avec laquelle nous parcourons l'histoire du Cameroun et retraçons pour l'intérêt du peuple camerounais l'action de tous ses martyrs. C'est dans ce sens que cette édition verra une grande figure de l'indépendance du Cameroun : Ernest OUANDIE ; lui-même présenté à travers une clé herméneutique nouvelle : sa fille, Ernestine OUANDIE, qui se fera elle-même martyr à son tour en 2009. vous comprenez donc qu'il serait naïf de croire qu'on peut ignorer le passé et prétendre construire solidement le futur. C'est pour cela que la quasi-totalité de ces projets, prétendus de « grandes réalisations », est ipso facto voué à l'échec pour la seule raison qu'ils ne sont pas construits à partir des leçons de l'histoire. En demandant au peuple de « MAINTENIR LE FIL DE L'HISTOIRE » nous voulons doter les jeunes camerounais des invariants historiques qui leur permettra de se connaître eux-mêmes dans les figures passées comme Ernest OUANDIE, de connaître leur pays à travers des figures actives comme Paul Eric KINGUE, et par-là, de savoir comment se situer eux-mêmes afin de se préparer à être à leur tour les figures de l'avenir de leur pays.

Comment faire pour y participer ?

C'est très simple. Quel que soit l'endroit où l'on se trouve et quels que soient les moyens qu'on dispose, on peut participer activement à cette semaine des Martyrs. Déjà pour avoir le programme détaillé des activités en Belgique, au Maroc et au Cameroun, j'invite tous les Camerounais et les amis du Cameroun à se connecter sur notre site web : fevrier2008.venez.fr
Ils peuvent aussi retrouver notre page facebook/Mouvement de Fevrier2008 ou nous contacter par courriel à fev2008cameroun@gmail.com
Pour ceux qui sont en Belgique ou dans les pays proches de la Belgique, ils sont invités massivement à la « Conférence Internationale » du 08 mars à Bruxelles. Ceux du Maroc sont invités à la « Soirée de Commémoration des martyrs de l’immigration clandestine » à Rabat. Pour ceux qui sont au Cameroun ou dans d'autres pays, nous le demandons simplement de poster sur notre page facebook des messages de soutien à Paul Eric KINGUE qui actuellement en a vraiment besoin.

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Propos recueillis par Hugues SEUMO

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