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3 novembre 2020

3 novembre 1960 – 3 novembre 2020: il y a soixante ans, l’assassinat de Félix Roland Moumié

Felix_Roland_Moumie03112020

Le 3 novembre 1960, très tôt dans la matinée, l’avion transportant Marthe Ekemeyong épouse Moumié se pose sur le tarmac de l’aéroport de Genève. Cette dernière est convaincue que son mari est simplement malade. Une fois à l’hôpital cantonal de Genève, la femme du leader indépendantiste camerounais le trouve inerte, les yeux fermés. Elle comprend dès lors que son époux n'est plus de ce monde.

Dans la nuit du 16 au 17 octobre 1960, c'est après un dîner en compagnie de Jean-Martin Tchaptchet (président de la section France de l’UPC) et un journaliste nommé Claude Bonnet dans un restaurant genevois, que Félix Moumié ressent de premiers et violents troubles.

Félix Roland Moumié avait déjà rencontré ce journaliste (Claude Bonnet ) l’année précédente à Accra (où il vit en exil), puis à Genève en compagnie de Jean-Martin Tchaptchet.

En réalité, Claude Bonnet n’est pas un journaliste mais un ancien militaire français, membre du service de documentation extérieure et de contre-espionnage français. Il s’appelle en réalité William Bechtel et il a été choisi par les autorité françaises de l'époque pour mener à bien cette sale besogne.

"Durant le repas dans le restaurant huppé, Bechtel parvient à verser une dose de poison dans le pastis de Moumié, mais ce dernier ne semble pas vouloir boire. Voyant le dîner avancer, et sans doute par peur de louper sa cible, Bechtel introduit alors une nouvelle dose, cette fois-ci dans le verre de vin du leader. Vers la fin du repas, Moumié, qui n’avait jusqu’alors pas touché à ses verres est visiblement assoiffé. Il descend coup sur coup ses deux verres d’alcools. La double dose de poison va être fatale au nationaliste camerounais mais, en accélérant sa mort" (1)

Félix Roland Moumié se tordant de douleur, médécin de son état, diagnostique lui même un empoisonnement et se fait admettre dans une clinique privée le 17 octobre 1960. Il affirme à ceux qui étaient auprès de lui à Jean-Martin Tchaptchet et Liliane Folkner (Fille de joie) qu'il a été empoisonné par la Main rouge, organisation extrémiste tenue pour responsable des meurtres de plusieurs nationalistes algériens : Me Ould Aoudia à Paris, Aït Ahcène à Bonn et Aïssou à Bruxelles. Transféré à l'hôpital cantonal de Genève, placé dans un poumon d'acier, il agonise plusieurs jours et meurt le 3 novembre 1960.(2)

Conduit dès le lendemain à l’hôpital, Moumié hurle aux médecins qui le prennent en charge : « On a empoisonné mon verre ! »,se souvient le Dr. Daniel Pometta dans le documentaire "Mort à Genève" – l’empoisonnement de Félix Moumié, signé Frank Garbely. Moumié sombre peu après dans un coma profond et décède le 3 novembre 1960.

William Bechtel, est très vite recherché. Ce dernier ayant reservé un hôtel à Genève sous son vrai nom. Lors de la fouille de sa chambre par les policiers genevois, ces derniers découvrent des traces de thallium dans l’une de ses vestes. Un mandat d’arrêt international sera aussitôt émis puis rapidement annulé en France par le Sdece. Arrêté en 1974, en Belgique, puis extradé en Suisse en vue d’un procès, il est libéré sous caution contre 100 000 francs suisses (environ 92 200 euros). En 1980, son procès aboutira finalement à un non lieu.(3)

En dehors de William Bechtel, la police genevoise soupçonne également dans une autre version des faits une potentielle complice : une Française aux cheveux bruns nommée Liliane Folkner. Elle est soupçonnée d’être également en relation avec le Sdece.

Après l’assassinat de Félix Moumié sa dépouille a été transférée à Conakry, Guinée, òu elle a été embaumée et déposée dans un sarcophage. Quarante cinq ans plus tard après le décès de son époux, Marthe Moumié se rend sur la tombe de son mari. Elle entreprend une dernière tentative de tenir une vieille promesse. À la veille de sa mort, elle avait fait la promesse solennelle à Félix Moumié qu’il trouverait un jour son dernier repos au Cameroun. Mais la visite de Marthe au cimetière de Conakry prend une tournure dramatique : la tombe de Moumié a été profanée, le cercueil et la dépouille embaumée ont disparu. En pleurs, cette dernière s'exclame dans le film intitulé "Mort à Geneve", signé Frank Garbely "Il faut que la jeunesse soit au courant"..

Vu par les hommes du pouvoir de Ahmadou Ahidjo, le Dr Moumié était un homme dangereux, " un opposant farouche des puissances coloniales, un homme impitoyable refusant tout compromis, un anti-impérialiste fanatique, un cryptocommuniste à la solde de Moscou et de Pékin ". Mais dans les rangs des nationalistes, Moumié était plutôt " le plus affirmé des Camerounais, panafricaniste convaincu et homme d´honneur ". (4)

Bref parcours historique de Félix Roland Moumié

1940 : CM2 à l'école régionale de Dschang, où il obtient le certificat d'Etudes

1941 : Moumié admis au concours d'entrée à l'Ecole Supérieure Edouard Renard de Brazzaville.

1945 : Ecole professionnelle William Ponty à Dakar.

1947 : Retour au Cameroun, début de sa carrière professionnelle.

1948 : Um et Moumié se rencontrent à Kribi.

1950 : Moumié élu viceprésident de la conférence des partisans pour la paix.

1951 : participe au Festival de la Jeunesse de Berlin.

1952 : Participe à la Conférence Internationale pour la défense de l'Enfant de Vienne.

1952 : Moumié élu président de l'UPC.

1952 : Moumié est Battu aux élections à l'Atcam.

1952 : Moumié participe au congrès de l'Union Internationale des Etudiants de Bucarest en septembre.

1955 : Le 22 avril, Moumié et ses lieutenants émettent " la proclamation commune " et émeutes de Douala.

1955 : Le 13 juillet, interdiction de l'U.P.C au Cameroun Français et exil de Moumié au Cameroun Britannique.

1957 : Le 30 mai, interdiction de l'UPC au Cameroun Britannique et exil au Soudan.

1957 : Du 15 au 23 avril, Moumié assure le secrétariat de la conférence la conférence des [huit] Etats indépendants d'Afrique.

1958 : Asile au Caire.

1958 : Moumié assiste aux rencontres Afroasiatiques.

1959 : Création de l'Armée de Libération Nationale Kamerunaise (ALNK).

1958 : présent à la Conférence des Juristes Afroasiatiques de Damas

1958 : février, Moumié conduit la délégation de l'UPC à la 11ème session du Conseil de Tutelle.

1959 : mars, Moumié conduit la délégation de l'UPC à l'ONU pour exiger des élections avant la proclamation de l'indépendance.

1960 : Le 3 novembre, décès de Félix Moumié.

1- Pierre Houpert, Jeune Afrique
2- "Mort à Genève" – l’empoisonnement de Félix Moumié, Film du journaliste Franck Garbely
3- Journal l'Eveil Genevois, novembre 1960
4- Denis Nkwebo in Peuple Sawa

 Par Hugues SEUMO

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