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11 août 2007

Enquête /Enfants vendeurs, domestiques, cireurs de chaussures…Les esclaves des temps modernes

Enfants_exploit_s_en_AfriqueMalgré l’existence des textes de lois et autres conventions sur la protection des enfants, des millions de petits garçons et filles, sont chaque jour exploités, dans l’indifférence totale.

Le 12 juin 2007, la communauté internationale a célébré, la journée mondiale de lutte contre l’exploitation des enfants. Un jour comme les autres pour des millions d’enfants, qui travaillent en Afrique et dans d’autres pays en développement, employés par des adultes, ou pour leur propre compte.

Ce jour, la petite K.A.M, âgée de 11 ans, est allée vendre des jus au bord d’un trottoir du quartier Angré. (NDLR, nous sommes en Côte d’Ivoire) . Depuis 4 mois, elle exerce cette activité, pour le compte de sa tutrice. Elle vend du lundi au samedi, de 7 heures à 20 h. Soit 13 heures d’affilée. Sa recette journalière varie de 2500 F Cfa à 3000 f CFA. K.A.M vient d’un village de Daloa. Elle a été “placée” chez sa tutrice par sa tante, qui passe à la fin de chaque mois récupérer son salaire, qui s’élève à 10 000 F CFA. Avant de se retrouver à Angré, la fillette vendait de l’eau glacée dans la commune d’Abobo, pour sa belle-mère. Ses parents biologiques sont séparés. La petite, contrainte de voler de ses propres ailes, ne souhaite pas retourner sur les bancs de l’école, qu’elle a quittés en classe de cours élémentaire première année (CE1). Son souhait est de faire des économies, grâce à l’argent que récupère sa tante, pour payer son apprentissage de couture.

L’histoire de cette enfant est commune à celle de nombreuses autres fillettes, dont l’âge se situe entre 5 et 13 ans, qui chaque jour, sous le soleil et sous la pluie, arpentent les rues de la capitale économique ivoirienne, pour vendre des beignets, des jus de fruit ou de l’eau glacée.

Selon les règles internationales, est considéré comme travailleur mineur, tout enfant de 5 à 11 ans, effectuant au moins une heure de travail rémunéré, ou 28 heures de corvées ménagères par semaine. Tout enfant de 12 à 14 ans, effectuant au moins 14 heures de travail rémunéré ou 28 heures de travaux domestiques par semaine. Ces enfants sont pour la plupart des orphelins, qui ont perdu l’un ou les deux parents, des déplacés de guerre, suite à la crise militaro-politique du 19 septembre 2002, ou tout simplement issus de parents extrêmement pauvres, qui se résolvent à les mettre à contribution pour le budget familial.

Leur place n’est pourtant pas dans la rue, mais sur les bancs de l’école, comme les autres enfants. Malheureusement, en lieu et place des cours de dictée et de lecture, ces jeunes travailleurs subissent au quotidien, injures, bastonnades et humiliations. La petite T.M, âgée de 10 ans, environ, ne dira pas le contraire. Vendeuse d’eau glacée dans les rues de Marcory, elle se souvient, en larme, du jour où elle a perdu sa recette journalière, qui s’élevait à 350 f CFA. Ce jour là, elle a été battue et privée de nourriture par sa patronne, qui en avait certainement gros sur le cœur.

Il existe pourtant des instruments juridiques, tels la convention relative aux droits de l’enfant (CDE), et la charte Africaine des droits de l’Homme, qui protègent, du moins sur le papier, contre les mauvais traitements. Ladite convention, ratifiée par la côte d’Ivoire, stipule en son article 19, que les Etats parties prennent toutes les mesures législatives, administratives ,sociales et éducatives appropriées, pour protéger l’enfant contre toutes formes de violence, d’atteinte ou de brutalité physiques ou mentales, d’abandon ou de négligences, de mauvais traitement ou d’exploitation. Y compris la violence sexuelle, pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou de l’un d’eux, de son ou de ses représentants légaux, ou de toute autre personne à qui il est confié.

Comme tout texte de loi, la convention relative aux droits de l’enfant ne vaut que si elle est mise en application. Ce qui est loin d’être le cas, si l’on s’en tient aux nombreuses violations dont sont victimes les enfants. Dans certaines familles, ce sont des fillettes de 7 ans, comme la petite A.S, qui sont employées comme servantes. Celle -ci vend de l’eau glacée sur un trottoir de la commune de Koumassi. Elle est payée à 5000 f CFA le mois. Son salaire est récupéré par sa tante.

Comme la petite A.S, de nombreuses fillettes, dont l’âge oscille entre 6 et 13 ans, sont exploitées chaque jour dans des maisons à Abidjan et à l’intérieur du pays, où elles servent de bonnes à tout faire. Leur journée de travail commence à 5 h du matin où à 6 h pour d’autres, et s’achève à 19 heures où plus tard. Ces enfants sont utilisés dans les travaux domestiques (lessive, vaisselle, cuisine), et exploités dans les rues comme vendeuses. Elles sont issues de toutes les régions du pays, mais aussi des pays de la sous région.

Sur le plan national, la région de Bondoukou est réputée comme la plus grande pourvoyeuse de domestiques. Certaines femmes sont spécialisées dans le trafic des filles domestiques, qu’elles convoient à Abidjan, avec l’accord des parents. Dans les pays de la sous région, les Koussas, originaires du Burkina Faso, sont elles aussi réputées. En provenance pour la plupart des villages de la Côte d’Ivoire, ces fillettes travaillent sous contrat qui s’étend sur un an renouvelable. Elles sont en général placées dans les familles par leurs parents, pour la somme de 5000 f CFA le mois, payable à la fin de l’année, soit 60000 f CFA, et deux complets de pagne. Leur traitement dépend du caractère de la maîtresse de maison. Certaines, moins nombreuses, sont bien traitées. Mais la grande majorité, vivent dans des conditions difficiles et dorment à même le sol, dans la cuisine ou au salon. Elles sont régulièrement insultées, battues et privées de nourriture. Parfois, ces adolescentes sont victimes d’abus sexuelles. Pourtant, la Côte d’Ivoire a ratifiée en 2003, les conventions 138 et 182 de l’organisation internationale du travail (O.I.T), sur l’âge minimum d’accès à l’emploi et sur les pires formes du travail des enfants. L’âge minimum est de 14 ans et figure dans l’article 23 alinéas 8 du code Ivoirien de travail.

Selon Mlle Assohou Véronique du Bureau international catholique de l’enfance (B.IC.E), ce code ne précise malheureusement pas le type de travail, même s’il interdit le travail de nuit des enfants. Elle souhaite que ledit code soit reformé et porte plus de précisions sur le sujet. Le B.I.C.E n’a pas de pouvoir coercitif, pour lutter contre l’exploitation des enfants. Il procède par le plaidoyer, pour sensibiliser. ” Nous essayons autant que possible d’enlever l’enfant du milieu où il est menacé et nous l’accompagnons psychologiquement .Souvent , certains adultes veulent rendre à l’enfant ce qu’ils ont eux -mêmes vécu dans leur enfance. Nous les sensibilisons aussi, en les avertissant qu’ils peuvent être poursuivis ” a-elle dit

Le Bureau international catholique de l’enfance estime que les petits sont dignes de respect, quelles que soient leurs origines sociales, culturelles ou religieuses. Selon Traoré Moussa, l’un des responsables de la communication à l’UNICEF, joint au téléphone, cette structure vient en appui aux programmes de gouvernement en de matière lutte contre l’exploitation des enfants. Le forum des organisations non gouvernementales d’aide à l’enfance en difficulté, regroupe des associations qui oeuvrent pour la protection des enfants. Pour Delphine Koffi, l’une des responsables, le travail des enfants est un phénomène complexe, parce qu’il a un caractère socialisant et éducatif. ” Les enfants peuvent aider leurs parents dans les travaux domestiques. Ce que nous combattons, c’est le caractère avalisant de ces travaux, ceux qui mettent un frein au développement physique et psychologique de l’enfant, bref, les pires formes de travail des enfants ” a -t-elle indiqué.

On ne peut parler du travail des enfants sans évoquer ceux qui sont exploités dans des plantations. Koffi Victor ,spécialiste du travail des enfants à la direction de la protection sociale au Ministère de la famille, de la femme et de l’enfant , que nous avons rencontré , pour avoir l’avis de ce département sur le sujet, a voulu nous soumettre à une longue procédure administrative. Il a exigé, avant de répondre à nos questions, une autorisation écrite du Ministre, ou de son Directeur, en mission à l’étranger au moment où nous mettions sous presse. L’exploitation et la maltraitance des enfants, sont pourtant des secrets de polichinelle, qui méritent d’être traité avec diligence.


Calvin WANDJI

IA- 23/8/2007

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