France - Tchad : Le mariage de Sarkozy perturbé par les rebelles tchadiens

Les rebelles tchadiens sont effectivement entrés dans N’Djamena, la capitale tchadienne. Le président Idriss Déby Itno  est porté disparu. Des scènes de pillages ont été constatées dans plusieurs quartiers de la ville. Des centaines de réfugiés se dirigent vers le Nord du Cameroun.

Les rebelles ont pris le contrôle de N’Djamena ce matin. Ils sont présents dans toutes les rues de la capitale tchadienne. La population acclame les rebelles au passage, soulagés de se débarrasser du dictateur Déby.

Selon une dépêche de France 24, le président français s’est ‘’longuement’’ entretenu avec Idriss Déby ce matin, notamment pour l’aider à se mettre à l’abri dans un pays voisin. Depuis ce matin, il se serait réfugié au Gabon, d’après certaines sources. D'autres sources affirment que son ancien homologue Paul Biya aurait refusé de l'accueillir au Cameroun.

Plusieurs centaines de soldats fidèles à Idriss Deby se sont réfugiés à Kousséri au Cameroun, ville la plus proche de N'Djamena.

Plus de 1600 militaires français du dispositif Epervier sont chargés d’assurer la sécurité des Français de N’Djamena et de l’Ambassade de France au Tchad.

Les chefs d’Etat africains réunis à Addis Abeba ont chargé les présidents Sassou N’Guesso et Kadhafi d’essayer de trouver une solution pacifique à la crise tchadienne.

Qui est Idriss Deby ?

Né en 1952 à Fada, c'est un Zaghawa. Une ethnie à cheval sur la frontière tchado-soudanaise. Baccalauréat en poche, le jeune Idriss Déby intègre l'école d'officiers de N'Djamena puis obtient, en 1976, une licence de pilote professionnel en France.

De retour au Tchad au terme de ses études en hexagone, il rejoint Hissein Habré en 1980. Les deux hommes s’opposent à Goukouni Weddey, président du défunt gouvernement de transition.

Les relations entre Deby et Habré vont se tendre à la fin des années 1980. Le colonel Déby est alors conseiller militaire du président après un passage en France, par l'école de guerre interarmées (1986-1987). Accusé de complot par Habré dont le pouvoir devient de plus en plus dictatorial et se solde par des milliers d'arrestations et de tortures, Déby s'enfuit en Libye puis au Soudan. Dans cette région frontalière où vivent des Zaghawas, il recrute une armée et fonce sur N'Djamena qu'il enlève le 1er décembre 1990 en chassant Hissene Habré.

Au Tchad, l'histoire balbutie sans cesse. Déby est parti des confins soudanais pour s'emparer du pouvoir comme Habré l'avait fait dix ans avant lui. Ceux qui, en 2008, ont voulu renverser Déby étaient aussi ses anciens compagnons d'armes et sont partis de la frontière soudanaise.

La France, qui entretient toujours une base au Tchad, lui apporte un soutien militaire indirect. L'armée française lui fournit les renseignements qui permettent aux colonnes tchadiennes d'arrêter les rebelles. Mais la politique africaine de Nicolas Sarkozy est manifestement autre. Déby n'a pas su comprendre que l'Afrique et Paris avaient changé.

Et la force Européenne ?

La bataille de N'Djamena intervient après le lancement cette semaine à Bruxelles, de la force européenne appelée à intervenir au Darfour, dans l’Est du Tchad et en Centrafrique. Cette force dénommé Eufor devrait être composée de 3700 hommes, des militaires français pour l’essentiel.

Eufor était supposée entrer en action avant la fin du moi de mai 2008. Sa mission officielle : protéger les réfugiés du Darfour, les déplacés tchadiens et centrafricains, soit 450'000 personnes au total. Une opération dénoncée par les rebelles tchadiens qui voient en cette mission militaire, un soutien déguisé au pouvoir de Deby.

L'offensive éclaire des insurgés, partis de l'Est, a accru «l'instabilité» sur le terrain. C’est un porte-parole de la future Eufor qui a fait le constat voici quelques jours. Il annonçait en substance le report du déploiement. Plusieurs experts, ainsi que les autorités tchadiennes, estiment que le Soudan, parrain des rebelles tchadiens, les a incités à attaquer N’djamena pour perturber ce déploiement à ses portes. Quoi qu’il en soit, c’est un défi que vient de lancer les rebelles de ce pays d’Afrique centrale à l’Europe des 27. En marge de son mariage avec Carla Bruni, mariage célébré à l’Elysée ce samedi, Sarkozy a contacté ses 26 collègues del’UE sur la question tchadien. C’est en effet le premier baptême de feu du président français sur le chemin du cimetière de la France Afrique.

Et la leçon de la probable chute de Deby ?

Quelques minutes avant sa chute ( ?), suite au conseil de l’Elysée selon une source bien renseignée, Idriss Deby aurait choisi le Cameroun pour se réfugier mais, le pouvoir de Yaoundé a très tôt refusé son offre. Peut être sans doute la raison de sa fuite vers le Gabon ? La situation demeure en tout cas confuse pour l’instant.   

Le pouvoir de Yaoundé craint également depuis un certain temps de se retrouver dans la même situation que celle du Tchad, surtout que le pays tout entier constituerait une poudrière. Nous y reviendrons.

© camer.be : Hermann G’nowa et Hugues SEUMO